-Juste Ève, bonsoir, me dit Rob en me rejoignant dans la rue.
-Arrête avec ton « juste Ève » lui dis-je le frappant sur la poitrine.

Mon poing rebondit sur ses pectoraux bien définis. Il avait changé sa camisole pour un t-shirt assez moulant. Il avait un corps qui méritait d’être moulé.

-OK, OK, j’arrête, répondit-il en riant.
-Merci, lui dis-je en lui faisant une grimace.
-Bon, alors on va où ?
-Suis-moi !

Nous marchâmes en direction du parc. En route, il me raconta des blagues et des histoires. De temps à autre, je regardais à côté de moi, et je fondais de plus en plus devant sa perfection. Nous arrivâmes au boisé quelques minutes plus tard.

-Va devant, tu connais plus le chemin que moi, me dit-il avec un clin d’œil.

Je rentrai dans le sentier en essayant d’éviter les branches. J’avais une dizaine de pas de faits quand, tout à coup, je sentis sa main contre mon dos.
Je m’immobilisai.
Il la descendit à ma taille. Je sentais de la chaleur et mon cœur commença à battre plus fort. Avec son autre main, il tassa mes cheveux vers la droite et découvrit mon cou. Je sentis son souffle frapper ma peau, et je frissonnai. Je l’entendis ricaner un peu, puis il posa ses lèvres. Un picotement parcouru le long de ma colonne, mes genoux faiblirent.

Il prit mes épaules et me retourna face à lui. Il me regardait intensément. Son visage était partiellement caché par les ombres du boisé, il était encore plus beau et mystérieux. Il posa ses mains sur mon visage.

-Tu es vraiment belle Ève.
-Toi—toi aussi, réussis-je à dire.

Il approcha sa bouche de la mienne.
Lorsque je sentis nos lèvres se toucher, mon corps entier picota. Des vagues de frissons déferlèrent dans tous mes membres. C’était mille fois mieux que ce que j’avais ressenti la première fois qu’il m’avait touché l’épaule. Je glissai mes mains sur son corps et senti tous ses muscles sous son t-shirt.

Je vivais une extase totale, lorsque nous entendîmes un bruissement dans les feuilles. Nous nous immobilisâmes quelques secondes.
Puis, un autre bruissement, plus haut cette fois-ci. J’entendis un craquement, et je sentis quelque chose me tomber dessus. Je criai et couru vers la sortie du boisé, sentant des petites griffes me grafigner la tête et le cou, accompagnées de cris aigus. Je réussis à arracher la chose poilue de mes cheveux et la lançai dans la rue. L’écureuil fila à toute vitesse loin de moi.

-Ève, es-tu correcte, demanda Rob en sortant du sentier.
-Je pense que je vais retourner chez moi…
Je n’avais pas vu Rob depuis deux jours, mais je me surprenais à penser à lui un peu trop souvent. Son sourire, sa voix, la sensation de ses mains sur mes bras... Il était beaucoup trop parfait. Le genre de perfection qui, si nous étions dans un film, ferait définitivement de lui un dangereux psychopathe.

Je passais un peu trop de temps à lire devant ma fenêtre, au cas où je le verrais sortir de chez lui. Mais c’était surtout pour l’éclairage. On lit beaucoup mieux avec la clarté naturelle. Oui oui.

En après-midi, je le vis tourner le coin de la rue. Je déposai mon livre en vitesse et descendis les marches deux par deux en courant vers la porte d’entrée.
-Qu’est-ce que tu fais, me demanda ma mère.
-Je vais me promener un peu, lui répondis-je.
-Wow, t’es motivée!

Une fois dehors, je ralentis et tentai de reprendre mon souffle pour avoir l’air naturelle. Je le vis sur le trottoir devant la maison voisine. Il portait encore une camisole et des shorts, qui exposaient sa peau juste assez bronzée.
-Oh hey salut, lui dis-je.
-Ève Rayonne, bien le bonjour, répondit-il, en faisant une similirévérence.
-Tu sais que tu peux m’appeler juste Ève hein?
-Ah merci de m’en informer juste Ève, dit-il avec un clin d’œil.

Oui, un clin d’œil, mais pour des raisons mystérieuses, c’était un clin d’œil sexy, et pas un clin d’œil perturbant comme celui de mon oncle Fernand.

-Qu’est-ce que tu fais de bon, me demanda-t-il.
-Oh pas grand-chose là, je me promenais un peu, il fait tellement beau, faut en profiter!
-Tellement! Tu vas où quand tu te promènes? On dirait que je connais pas assez le coin pour faire une bonne promenade.
-Ah ben un peu dans le quartier là, je vais dans le parc…
-Il y a un parc?
-Ouais c’est vraiment joli, il y a un boisé et tout.
-Va falloir que tu me montres, j’aime beaucoup ça me promener dans la nature.
-On peut y aller ce soir si tu veux.
-Ah oui, ce soir?
-Ouais le soir c’est joli, les sentiers sont illuminés.
-Ça serait parfait ça!

Il me sourit. Ses grands yeux bruns pétillants descendirent un instant vers mes lèvres, puis remontèrent à mes yeux.

-21h30, ça te va, lui demandai-je.
-Oui, c’est bon ça. Le soleil va être couché, on va mieux voir les lumières dans le boisé.

Il me fit un autre clin d’œil.

-Exactement, lui dis-je en riant.
-Bon, je te laisse à ta promenade juste Ève, me dit-il en mettant sa main sur mon épaule.

Je sentis de l’électricité et de la chaleur se diriger dans ma main et dans mon cou. Je fermai les yeux légèrement, et je le vis sourire à nouveau.

-C’est--c’est bon Rob! À ce soir.

Il me fit un thumbs up et repartit en direction de sa maison. Mes jambes étaient un peu molles, mais je réussis tout de même à me rendre jusqu’au coin de la rue, juste assez loin pour lui donner le temps de retourner chez lui. Quand je ne le vis plus dans la rue, je courus jusqu’à chez moi.

-Déjà, dit ma mère en me voyant entrer.
-Ouais ben il fait un peu chaud, je vais y retourner ce soir, il devrait faire plus frais.
-Ah d’accord…
Il était sept heures du matin quand les camions arrivèrent. Je dis « les », mais c’était peut-être « le ». Ça sonnait comme un « les » en tout cas. Un gros « les ». Même avec mon oreiller sur la tête, le son était très désagréable… mais moins désagréable que le manque d’air que me causait mon oreiller, alors après dix minutes je finis par me lever.

C’était ce matin que les nouveaux voisins emménageaient. Je voyais ça d’un bon œil, ça mettrait peut-être de la vie dans notre quartier. Les anciens n’étaient pas très… impliqués? Je n’avais jamais su leur prénom. C’était toujours « monsieur et madame Talbot ».

Mon père était à la cuisine en train de boire son café lorsque je descendis.
-As-tu vu nos nouveaux voisins, me demanda-t-il.
-Non, mais je les ai entendus.
-Ouais c’est sûr, trois personnes, ça se déménage pas avec une voiture!
-Trois?
-Ils ont un gars.
-Ah! Je savais pas… Il est vieux, demandai-je après un silence.
-Qui?
-Leur gars.
-Oh je sais pas, il est grand là, il a ton âge… Pourquoi?
-Juste pour savoir…

*

Ce n’est qu’une semaine plus tard, en revenant des boutiques, que je le vis. Il passait la tondeuse sur la pelouse devant sa maison. Il avait l’air assez grand, portait un short beige qui arrêtait en haut des genoux, et une camisole bleue. Il avait les cheveux bruns, un peu décoiffés.

Je traversai la rue, sans même regarder; mes yeux étaient fixés sur lui qui faisait le va-et-vient avec la tondeuse. Plus je m’approchais, mieux je le voyais. Sa camisole découvrait ses épaules et ses bras bien définis. Ses biceps étaient gonflés pour mieux maîtriser la tondeuse. Arrivé au bout du terrain, il se retourna et je vis son visage. Il avait un petit début de barbe, une mâchoire franche. Ses yeux étaient cachés par ses Ray-Ban.

Il était beau.
Il était parfait.

J’approchai de lui. Lorsqu’il me vit, il coupa le moteur.
-Salut!, lui dis-je.
-Salut?
Il retira ses lunettes de soleil. Ses yeux étaient chocolat.
-Ça va bien?
-Euh oui…
-Tu sais pas je suis qui hein?
-Non pas vraiment, dit-il en riant.
-Je suis ta voisine d’en face, répondis-je en pointant ma maison.
-Ahhh! Enchanté alors!

Il s’approcha de moi pour me serrer la main et me sourit. Ses dents étaient aussi parfaites que le reste, et il avait une petite fossette sur sa joue droite. Je trébuchai sur la chaîne de trottoir en m’avançant, mais il m’attrapa.

-Oups, excuse-moi!, lui dis-je, complètement embarrassée.
-C’est pas grave, répondit-il en riant. Moi c’est Rob, ajouta-t-il, en me regardant assez intensément.
-Euh, Ève. Ève Rayonne.
Je lui souris.
-Eh bien, Ève Rayonne, c’est un plaisir de te rencontrer. Tu m’excuseras, mais il faut que je continue ma tondeuse, sinon mes parents vont me tuer.
Il se mit à rire.
J’étais encore sous le choc d’avoir senti ses mains sur mes bras. Ses grandes mains chaudes… C’était quelque chose que je voulais définitivement sentir à nouveau dans un futur très proche.
-Salut là, bonne tondeuse, lui dis-je en retournant chez moi, et en jetant un dernier coup d’œil à ses fesses alors qui se pencha pour redémarrer sa tondeuse.
Mon meilleur ami m’a récemment dit : « Je sais c’est quoi mon problème! Sans étudier, je comprends 75-80% de la matière, alors c’est pour ça que j’étudie pas. Le coût marginal de quelques pourcentages de plus à l’examen, c'est-à-dire peut-être une ou deux heures d’étude, n’en vaut pas la peine! »

Faisant malheureusement partie des êtres inférieurs qui nécessitent de l’étude, je suis toujours à la recherche de nouvelles méthodes pour rendre ce calvaire possible. Possible dans le genre de « j’ai le goût d’étudier » plutôt que « tiens, on dirait que mon mur a l’air intéressant, pourquoi ne le fixerais-je pas pendant une heure… »

En ces temps d’examens finaux, je me suis dit que je partagerais avec vous ma nouvelle philosophie, qui, je l’avoue, ébranlera assurément tous les fondements de comment on vous a appris à étudier.
C’est une immense révolution!
Non, c’est juste une analyse logique de l’acte d’étudier.

Vous avez sûrement déjà entendu des gens dire : « Je vais étudier beaucoup, je veux avoir un A+ », n’est-ce pas? C’était probablement des filles, qui ont des perles aux oreilles, des mèches, qui sont dans leurs cours avec six surligneurs différents, qui écrivent sur une règle pour que tout soit droit… bon, épargnons-nous le jugement là! Ces gens sont remplis de bonnes intentions, mais fondamentalement stupides. Ils tentent de contrôler un monstre beaucoup trop complexe (faites-moi confiance, je m’y connais en contrôle…).

Je suis rendu dans un tournant de ma vie, où je n’étudie plus en fonction de la note que je veux avoir, mais en fonction de la quantité de temps et de travail que je veux bien y mettre. Et si on y pense, étudier beaucoup pour avoir une bonne note est plus ou moins futile. Qu’est-ce qui nous dit qu’on étudie les bonnes choses, qu’on étudie correctement? Nous n’avons, en plus, aucun contrôle sur l’examen; si nous manquons de temps, si nous ne comprenons pas les questions, s’il est difficile, etc. Je trouve que cela fait beaucoup de variables à prendre en considération lors de la planification de « l’étude parfaite »… Certes, si on finit par connaître tout tout tout par cœur, on aura sans doute une bonne note, mais le temps requis pour connaître tout tout tout en vaut-il la peine? Vous n’avez pas une vie vous? Vous n’avez pas une caisse de bière qui ne se boira pas toute seule?

C’est pourquoi se concentrer sur la quantité de travail qu’on veut faire, une variable sur laquelle on a un contrôle total, m’apparait beaucoup plus logique. Par exemple : je suis prêt à étudier deux heures par jour pendant quatre jours pour cet examen. Je planifie mon étude en conséquence et voilà! J’aurai la note que j’aurai.

La différence est subtile, mais elle est là. Tout est dans la façon de voir les choses…

Sur ce, vous m’excuserez, mais j’ai un examen bientôt…


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