Au
manoir, on a la passion pour l’horticulture très variable.
Une
année on désherbe les plates-bandes, une année non.
(Ma
mère va sûrement me tuer de dire ça, car elle désherbe toujours un peu, mais
tsé, il n’y a pas de pendant printanier à l’opération feuilles mortes
automnale. Du moins, je n’en suis pas informé. Veuillez m’écrire…)
Une
chose est certaine, il y a un espace des terrains du Manoir qui est resté
vierge de toute intervention humaine depuis un peu trop longtemps. Genre qu’on
a des chênes et des érables de peut-être deux/trois ans. Tsé, les glands et les
hélicoptères qui tombent au sol à l’automne, le printemps suivant y’a une
petite feuille qui dépasse du sol et tu l’arraches sans problème? Ben nous
c’est rendu des mini arbres tellement ça fait longtemps qu’on n’a pas entretenu
ce coin-là.
Mais
bon, tout cela n’est pas important, tout ce que vous devez retenir, c’est
qu’étant donné la situation, je me suis donné comme petit projet extérieur
cette semaine de désherber.
Et ce que vous devez aussi retenir, c’est que
je suis entouré d’enfants. Non seulement ceux des voisins, mais de l’autre côté
de la ruelle, il y a une garderie en milieu familial depuis environ deux/trois
ans (est-ce un hasard que ça coïncide avec l’arrêt du désherbage, je ne pense
pas, moi!). Et vous le savez, je n’aime pas particulièrement les enfants.
Non,
c’est pas que je les aime pas… c’est juste que… je ne comprends pas vraiment
leur utilité.
Alors,
j’arrachais paisiblement mes mauvaises herbes, et je vois un petit groupe de la
garderie sortir avec la gardienne, probablement pour aller au parc. Je n’en
fais pas plus de cas, car je devais me battre avec les araignées et autres
bestioles dont je détruisais paisiblement l’écosystème. Une vingtaine de
minutes plus tard, la marmaille revient, et je les vois du coin de l’œil monter
sur le terrain et s’approcher de moi. Ils sont quatre, alignés un à côté de
l’autre, ils ont à peine deux ans, et ils me regardent avec leurs grands yeux.
Tsé les yeux des enfants qui ont encore une trop grosse tête pour leur corps et
qui ont donc l’air vaguement marionnette-esque. Il y en a un qui a un t-shirt
de Batman et une moppe de cheveux bouclés sur la tête. Ils m’analysent, comme
des extra-terrestres fraîchement débarqués.
Je
me retourne vers eux, et je leur dis bonjour. Ils me répondent avec un
« bonjour » presque à l’unisson.
-Pourquoi
t’arraches tes plantes?, me demande la fille du groupe.
Question
très légitime, mais comment expliquer le désherbage à des enfants?
-Ben
c’est que c’est pas les plantes qu’on veut. Regarde (en pointant), c’est
celles-là les bonnes, alors j’enlève tout ce qui est pas bon.
Un
petit garçon me repose la même question, parce qu’à cet âge-là, si on te parle
pas directement tu n’es pas capable de capter l’information diffusée à un large
public et l’appliquer à tes questionnements.
La
fille pointe ensuite le petit tapis à genoux que j’avais par terre.
-Pourquoi
t’as ça?
-C’est
pour mes genoux, quand je me mets à genoux, c’est plus confortable. Regarde
c’est mou…
Et je
me mets à genoux sur le petit tapis de mousse.
-Tu
peux essayer si tu veux.
Elle
se met à genoux sur le tapis. À ce moment-là, la gardienne, qui était restée
dans la rue leur dit que c’est assez, de revenir. Avant de partir, chaque
enfant se lance à genoux sur le tapis en disant : « C’est mou! »
et court ensuite vers la rue.
Même
moi, avec mon cœur de pierre, je dois avouer que c’était cute en calvaire!